@apmonews 14/09/2022
(Bangui)
(Dossier)
A l’instar de plusieurs pays africains, la réputation de la République Centrafricaine en matière de respect des normes démocratiques est mise à rude épreuve.
Le président Faustin-Archange Touadéra s’efforce de modifier la constitution de son pays pour « consolider son emprise sur le pouvoir ».
L’homme s’apprête ainsi à briguer un troisième mandat.
Au mépris des voix qui s’élèvent de plus en plus contre ce projet, Touadéra poursuit sa quête dans l’insouciance et la défiance.
Depuis le 06 août dernier et ceci jusqu’alors, des milliers de centrafricains descendent dans les rues pour protester contre ce plan du président.
Mais celui-ci fait la sourde oreille.
Le lundi 13 septembre, il a nommé un groupe de 55 personnalités, chargées de plancher sur la rédaction de la nouvelle constitution.
Ceux-ci disposent seulement d’un délai de trois mois pour finaliser les travaux.
Touadéra trahit son serment
Il y a un an, le 30 mars 2021, le chef de l’État Faustin Archange TOUADERA, réélu dans une élection très controversée pour un second et dernier mandat, avait prêté serment, pour la seconde fois sur la même Constitution.
Debout, la main gauche sur ladite Constitution, et la main droite levée, Faustin Archange TOUADERA a lu en français et sango, la langue nationale, ce qui est écrit dans la Constitution :
« Moi, Faustin Archange TOUADERA, je jure, devant Dieu, et devant la nation, d’observer, scrupuleusement la Constitution de la République centrafricaine, de sauvegarder l’intégrité du territoire, de préserver la paix, de consolider l’unité nationale, d’assurer le bien d’être du peuple centrafricain, de remplir consciencieusement le devoir de la charge, sans aucune considération d’ordre ethnique, régionale ou confessionnelle. De ne jamais exercer les pouvoirs qui me sont dévolus par la constitution à des fins personnelles. Ni de réviser le nombre et la durée de mon mandat et de n’être guidé en tout que par l’intérêt national et la dignité du peuple centrafricain ».
Aujourd’hui, les centrafricains et la communauté internationale viennent de reconnaître que Touadéra n’a fait que prononcer une récitation et non une prestation de serment.
Il a déshonoré ses engagements devant son peuple et il défie ce dernier.
L’argument du président
M. Faustin-Archange soutient que c’est la population centrafricaine, elle-même qui exige la modification de la constitution. « Je ne fais que la volonté du peuple »… « De plus en plus de voix s’élèvent pour exiger une modification de la Constitution », avait écrit le président centrafricain sur sa page Facebook, la veille de la fête de l’Indépendance.
Mais pour l’opposition et la société civile, « c’est une révision pour rien à l’exception de la volonté du président de créer un Empire ».
Regroupées dans un front commun, elles promettent mettre tout en œuvre pour faire échouer le plan Touadéra.
Pour Joseph Bindoumi président de la Ligue Centrafricaine des Droits de l’homme, une figure de la société civile, la Constitution centrafricaine est comme le ‘’crâne d’un chauve, sans soucis et donc sans poux’’.
« Si nous voulons exister comme peuple, respectueux de l’État de Droit, laissons la Constitution tranquille. Ne donnons pas l’impression de chercher les poux sur le crâne d’un chauve », a-t-il martelé.
Et pour l’opposant, Maître Crépin Mboli-Goumba, « Le Président Touadera échouera dans sa tentative de tuer la démocratie. Mais il aura essayé, pour son bon plaisir et celui des siens. Il n’aura finalement été fidèle à aucun de ses engagements, pas même son serment! ».
Toutefois, le Chef d’Etat, de son côté, ne cède pas à la pression. Il met le cap sur trois mois pour la finalisation des projets de lois à modifier dans la constitution.
Il faut rappeler, d’ailleurs, que la constitution centrafricaine n’a que 7 ans.
Elle a été adoptée en mars 2016.