Les gens fuient l’est de la RD Congo vers le Rwanda alors que les combats font rage à Goma.
Goma, ville de plus d’un million d’habitants, envahie par les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda… Une communauté internationale qui condamne mais qui ne sanctionne pas… Des Congolais en colère à Kinshasa qui s’en prennent à des ambassades… Comment expliquer et trouver une solution à ce conflit entre le Rwanda et la RDC qui dure depuis des années ?
Tout d’abord, les raisons de la colère. Afrikarabia, site spécialisé sur la RDC explique : « les Congolais ne comprennent pas pourquoi l’ONU ne sanctionne pas le Rwanda pour son soutien à la rébellion et la présence de ses soldats au Congo, alors qu’ils l’ont fait pour la Russie qui a envahi l’Ukraine. Un “deux poids deux mesures“ difficilement entendable à Kinshasa. » Le Conseil de sécurité s’est certes réuni, relève le site, « mais aucune mesure forte n’a été prise, si ce ne sont les sempiternelles condamnations et demandes de retrait que le M23 et son parrain rwandais ignorent copieusement. »
La France et l’Europe sur le banc des accusés
Pour ce qui concerne la France, poursuit Afrikarabia, elle « a été hier une cible privilégiée des manifestants (à Kinshasa). Sur l’enceinte de l’ambassade, on pouvait lire : “La trahison depuis longtemps… finissons maintenant“. Au Congo, la France est très souvent perçue comme “pro-Rwanda“. Depuis Nicolas Sarkozy, Paris tente péniblement de recoller les morceaux avec Kigali, après l’implication de la France pendant le génocide des Tutsis en 1994. Emmanuel Macron est sans doute le président français qui est allé le plus loin dans le rapprochement avec Kigali. Dans ce contexte, Paris est vu comme étant le principal frein aux sanctions contre Kigali, au Conseil de sécurité. Pourtant, remarque le site, depuis de nombreux mois, Paris est aligné sur les condamnations onusiennes. »
Et puis, souligne encore Afrikarabia, « il y a aussi une aide de l’Union européenne de 20 millions d’euros à l’armée rwandaise pour sa mission onusienne au Mozambique qui ne passe pas à Kinshasa. La question qui se pose est de savoir pourquoi l’Europe accorde une telle somme à une armée qui viole l’intégrité territoriale de son voisin ? »
L’ONU paralysée…
Le Figaro à Paris revient sur le blocage onusien : « en 2012, quand le M23 avait déjà pris le contrôle de Goma, toujours avec l’aide rwandaise, la réaction onusienne avait été brutale, rappelle le journal. Des sanctions avaient été rapidement prises et les États-Unis avaient pesé de tout leur poids. Les rebelles s’étaient finalement repliés en un mois. En 2025, si le scénario militaire est le même, l’époque a changé, pointe Le Figaro. Les tensions entre les puissances occidentales, d’une part, et la Russie et la Chine, d’autre part, bloquent toute initiative onusienne. Et la loi du plus fort, qui paraissait inadmissible en 2012, est nettement mieux admise. Kigali l’a compris. »
De plus, poursuit Le Figaro, les initiatives diplomatiques régionales ont échoué, qu’elles viennent de l’Angola ou du Kenya…
Résultat : « sans pression, le Rwanda est donc à même de dicter ses conditions, notamment une négociation directe entre Kinshasa et le M23. Or Tshisekedi refuse de parler à “des terroristes“. Fort de ce énième blocage, Kigali avance ses pions. Les rebelles menacent d’étendre leur emprise et de créer (dans l’est) une région autonome de Kinshasa. »
Désigner clairement les protagonistes !
En fait, résume Le Pays au Burkina Faso, « tout le monde ou presque jette la pierre au rwandais Kagame sans véritablement trancher dans le vif en faveur du Congolais Tshisekedi. Et la persistance de la crise est la rançon de cette hypocrisie de la communauté internationale qui a laissé pourrir la situation pour se mettre à courir maintenant dans tous les sens. »
Comment sortir de ce bourbier ? Pour Le Monde à Paris, il faut appeler un chat un chat : « aucune amorce de règlement du conflit meurtrier qui embrase l’est de la RDC ne peut être envisagée si les États-Unis ne font pas pression sur Kigali comme Barack Obama l’avait fait en 2012 dans des circonstances comparables. Mais au préalable, affirme Le Monde, les protagonistes doivent être nommés, ce que la communauté internationale a trop longtemps refusé de le faire. En RDC comme en Ukraine, il s’agit d’une guerre entre deux États souverains, tous deux clairement désignés. »
Par : Frédéric Couteau (rfi.fr)